Protégez vos travailleurs isolés
Le travailleur est dit « isolé » lorsqu’il effectue des travaux ou une tâche en étant :
- seul
– hors de portée de vue ou de voix pendant un certain temps
– sans possibilité de recours en cas d’accident ou de malaise.
Les entreprises ont bien évidemment l’obligation d’assurer la sécurité de leurs travailleurs isolés.
Si l’interprétation des textes est délicate, et génératrice de nombreuses omissions, l’employeur sera néanmoins tenu de prouver qu’il a tout mis en oeuvre pour protéger le salarié victime d’un accident. C’est donc une lourde responsabilité qui pèse sur les épaules de l’entreprise.
Les équipements DATI* (Dispositif d’Alarme pour Travailleur Isolé) sont des dispositifs d’alarme portés par le personnel isolé. Ils permettent d’alerter les secours lorsque le travailleur isolé se trouve en situation de danger, en détectant une situation inhabituelle.
Il existe 2 types de d’alarme :
- l’alarme manuelle (ou volontaire), qui est déclenchée par le porteur lors de l’appui prolongé sur un bouton spécialement prévu à cet effet. Cette alarme peut être sonore, visuelle ou discrète. Elle peut notamment s’avérer adaptée aux situations présentant des risques de blessure légère ou d’agression physique ;
- l’alarme automatique, qui est déclenchée en cas de perte de verticalité, et/ou en cas d’absence de mouvement prolongée (par exemple, en cas de perte de connaissance, de choc violent ou de chute). Le retour à la position initiale durant le temps de pré-alarme réglable interrompt le processus.
Il existe également des alarmes qui peuvent se déclencher par arrachement du dispositif.
Selon les modèles, les paramètres des dispositifs sont ajustables (angles de verticalité, sensibilité du détecteur de mouvement, durées de pré-alarme et d’alarme).
* Les termes « PTI » (Protection du Travailleur Isolé) et « dispositif homme mort » sont couramment employés pour désigner un système d’alarme DATI.
Un point sur le cadre juridique
Les obligations de l’employeur sont basées sur le l’article L 230-2 du code du travail : « Le chef d’établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l’établissement… ».
Attention : le chef d’entreprise (et/ou son délégataire) pourra voir sa responsabilité pénale et civile recherchée.
On notera les textes suivants :
La recommandation R.252 de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie de juillet 1966 pour les postes de travail isolés et dangereux.
- LOI 91.1414 du 31 décembre 1991 Relative à la prévention des risques professionnels, à la santé et à la sécurité du travail.
- Le décret 92.158 du 20/02/1992 Relatif aux prescriptions d’hygiène et de sécurité
- Article R 237-10 du code du travail Lorsque l’opération est exécutée de nuit ou dans un lieu isolé ou à un moment où l’activité de l’entreprise utilisatrice est interrompue, le chef de l’entreprise extérieure concerné doit prendre les mesures nécessaires pour qu’aucun salarié ne travaille isolément en un point où il ne pourrait être secouru à bref délai en cas d’accident. S’il s’agit de travaux effectués dans un établissement agricole, ne sont visés par les dispositions de l’alinéa précédent que les travaux réalisés dans les locaux de l’exploitation, de l’entreprise ou de l’établissement ou à proximité de ceux-ci. Nota : Décret 92-158 du 20 février 1992 art. 1 (art. R237-1) : les dispositions du présent chapitre ne s’appliquent pas aux travaux relatifs à la construction et à la réparation navales.
- Article du code du travail R 252 du 13 juin 1984 Tout salarié doit faire l’objet d’une surveillance directe ou indirecte de jour et de nuit.
- Directives CEE
- Art R233.1: le chef d’établissement doit mettre, en tant que besoin, les équipements de protection individuelle appropriés.
- Art R233-42-1 : le chef d’établissement et le CHSCT déterminent les conditions pour lesquelles les équipements de protection individuelle doivent être mis à disposition.
Quelques chiffres
En 1980 l’INRS commence à s’intéresser à la problématique du travailleur isolé. Depuis, on recense 3 lois, 7 arrêtés, une dizaine de décret et plus de 50 recommandations. Attention, pour un juge, une recommandation est en général considérée comme une obligation.
La base de données EPICEA de l’INRS nous informe que les accidents ayant pour origine une chute représentent environ 20% ; c’est un des risques majeurs avec les véhicules et les machines. C’est également une des 3 plus grandes source d’accidents mortels.
7,2% des travailleurs se déclarent être en situation d’isolement au cours de leur travail (enquête DARES). 4% au moins de tous les AT enregistrés dans la base concernent des travailleurs isolés (base EPICEA).
Démarche de prévention
Déterminer les caractéristiques du poste de travail isolé
- Caractéristiques du personnel concerné
- Conditions de l’isolement
- Formes et durées d’isolement au cours du travail réel effectué par l’opérateur
- Contraintes particulières du poste et de la tache pour aider au choix ultérieur du système d’alarme
- Nature des risques encourus
- Conditions de sécurité requises
Elaborer un plan de mesures
- Prévention directe : Aménager le poste et l’environnement de travail
- Améliorer l’éclairage, atténuer le niveau sonore, aménager les accès,..
- Mettre en place des EPC et/ou EPI
- Prévention indirecte : Organiser le travail
- Informer les salariés sur les risques
- Former les salariés
- Définir et mettre en oeuvre des moyens de communication et d’échanges
- Prendre les mesures d’organisation
- Sécurité ultime : Agir sur l’organisation des secours
- Alerter de manière fiable et rapide
- déclencher, transmettre, réceptionner et localiser l’alarme
- choisir les moyens d’alarme appropriés
- Secourir le plus rapidement possible
- organiser les secours avec élaboration d’un plan d’intervention précis
- Alerter de manière fiable et rapide
Les activités interdites à un travailleur seul
Certaines activités doivent faire l’objet d’une surveillance (par une personne qualifiée) et par conséquent ne peuvent être réalisées par un travailleur seul. Il est néanmoins possible d’obtenir une dérogation dans certains cas.
Les principales activités concernées :
- travail en hauteur (Code du Travail, article R4323-61)
- manoeuvres de camions et engins (décret du 8 janvier 1965)
- équipement de travail servant au levage de charge (Code du Travail, article R4323-41)
- travaux en puits ou galerie (décret du 8 janvier 1965)
- travaux électriques effectués hors tension et sous tension (décret n°88-1056 du 14/11/1988)
- travaux exposant à un risque de chute dans l’eau (arrêté du 25/07/1974)
Les moyens de protection
Pour ce qui concerne le travailleur isolé, cette approche conduira à l’évidence, à rechercher en priorité des mesures organisationnelles, mais aussi des mesures deformation et d’information des travailleurs appropriés aux problèmes spécifiques liés à l’isolement.
Une procédure de contrôle régulière de la présence du travailleur peut être suffisante. Une question simple à se poser est « Comment je sais où se trouve telle personne ? ». Cela peut être un tableau avec les lieux d’intervention, un badge scanné régulièrement, une procédure d’appel…
Si la victime ne peut pas donner l’alarme (inconsciente, immobile,…), les moyens d’alarmes possibles sont :
- Les appareils DATI
- Autres alarmes : systèmes de production, appels ou passages réguliers, contrôles ou visites
- Tierce personne
L’analyse d’un poste de travail isolé doit prendre en compte le type, la fréquence et la dangerosité du risque encouru.
Quoi qu’il en soit, il faut garder à l’esprit que le dispositif à mettre en place soit accepté par le travailleur et le moins contraignant possible, sinon il risque de ne pas être utilisé.